Que s’est-il passé à côté des locaux de la Croix-Rouge de Perpignan dans la nuit du 24 octobre 2021 ? Une plainte pour violence a, en effet, été déposée le 18 novembre après le suicide d’un occupant de l’abri de nuit. Et c’est le père de la victime, un sans-abri nommé Othman, qui a décidé de saisir la justice, ne croyant pas à la thèse d’un simple suicide. Dans une plainte que la rédaction de Toulouse Alerte s’est procurée, le père d’Othman explique : « Après une altercation, il (Othman, ndrl) a demandé à être accueilli aux urgences psychiatriques de l’hôpital, car il n’allait pas bien. […] Cette demande lui a été refusée. Pour ne pas rester dans la rue, il a décidé d’escalader le mur d’enceinte de la Croix-Rouge. Une fois à l’intérieur, il s’est fait interpellé par les vigiles qui d’après certains témoins l’ont frappé à plusieurs ». Enquête sur un événement qui pourrait être révélateur d’un dysfonctionnement plus profond au sein de l’abri de nuit de la Croix-Rouge à Perpignan.
« Ce sont eux qui ont tué Othman »
« J’ai supplié les employés de me laisser l’aider », assure Sandrine*. Cette dernière, également sans domicile fixe, affirme avoir été témoin des derniers instants entourant le suicide d’Othman. Elle raconte : « Il n’était pas dans son état normal, il a demandé à être placé en unité psychiatrique, les agents de sécurité l’ont mis dehors et l’ont frappé ». C’est à la suite de cette altercation qu’Othman aurait menacé de se suicider. « Un des employés lui a dit de se pendre, et que cela ferait un Arabe de moins », affirme Sandrine. L’autopsie conclut bien à un suicide, mais une enquête est toujours en cours pour déterminer les circonstances du drame. De son côté, le père d’Othman explique dans la plainte : « J’ai appris par la suite et de source sûre que des cachets de Lyrica circulent dans ce centre et qu’il rend les gens déprimés ». Après vérification, le Lyrica est un médicament utilisé dans le cadre de certaines formes d’épilepsie, des douleurs neuropathiques et de certaines formes d’anxiété. Parmi les effets secondaires, un risque de dépression et de comportement suicidaire a été observé chez les patients traités par antiépileptiques.
Des violences à répétition ?
Cette affaire pourrait être révélatrice de problèmes récurrents au sein de l’abri de nuit. La rédaction de Toulouse Alerte s’est procurée une vidéo de violences envers un sans-abri.
Sur les images datant de novembre 2020, on assiste à une altercation entre un salarié de la Croix-Rouge et un sans-abri. L’employé, facilement reconnaissable à son uniforme, pousse le sans domicile fixe. La scène se déroule sous les yeux des vigiles, qui n’interviennent pas.

Interrogé au sujet de potentielles violences, Lionel*, un ancien occupant de l’abri de nuit, assure : « Les violences là-bas, ça arrive tous les jours et elles proviennent des employés ». L’ex sans-abri dénonce également des pressions morales. « J’ai été victime de l’abri de nuit pendant le premier confinement. Ils m’ont jeté dehors parce que j’ai défendu une personne qui s’était fait voler sa carte bleue. Elle aussi a été mise à la rue ».
Contactée à plusieurs reprises, la Croix-Rouge n’a pas donné suite à nos sollicitations.
C. G. & A. D.